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7. Tumeurs épithéliales

Chapitre 7. Tumeurs épithéliales

Auteure : Solène-Florence Kammerer

 

Plan du chapitre

•   Introduction

•   Tumeurs malpighiennes

•   Tumeurs glandulaires

•   Tumeurs urothéliales

Objectifs

•   Savoir classer les différents types de tumeurs épithéliales en fonction de leur différenciation malpighienne, glandulaire ou urothéliale.

•   Connaître les principaux critères cliniques, diagnostiques, macroscopiques et microscopiques de ces tumeurs.

 

Introduction

Les tumeurs épithéliales peuvent être bénignes, ou malignes et sont alors dénommées carcinomes.

Elles sont développées à partir des épithéliums qui peuvent être de trois types : malpighien, glandulaire, urothélial.

Tumeurs malpighiennes

Les tumeurs malpighiennes, bénignes et malignes, sont très fréquentes et se développent surtout à partir des épithéliums malpighiens :

•   cutané : épiderme ;

•   muqueux : muqueuses malpighiennes du tube digestif (cavité buccale, pharynx, œsophage, canal anal) ou de l'appareil génital (figure 07.01).

Elles peuvent également se développer à partir de la métaplasie malpighienne des muqueuses glandulaires ou urothéliales. L'exemple le plus courant est celui du carcinome malpighien (ou épidermoïde) des bronches.

Tumeurs bénignes malpighiennes

Papillome

Le papillome est macroscopiquement une tumeur végétante, exophytique, souvent framboisée sur les muqueuses, en saillie sur le plan du revêtement malpighien qui lui donne naissance. Il peut siéger sur la peau (ex. : verrue vulgaire) ou sur les muqueuses. Il est fréquemment d'origine virale, lié à un virus du groupe HPV (Human Papilloma Virus) au niveau anogénital et oropharyngé ou a un pox virus (verrues vulgaires).

Sur le plan histologique, trois critères sont requis pour le diagnostic :

•   la papillomatose : crêtes épidermiques (ou épithéliales) allongées ;

•   l'hyperacanthose : épithélium malpighien épaissi au niveau du corps muqueux ;

•   l'hyperkératose : couche de kératine épaissie.

Il s'agit d'une tumeur bénigne présentant les critères suivants : architecture conservée, intégrité de la membrane basale, absence d'atypie cytonucléaire patente, mais on peut observer une augmentation de l'activité mitotique

Condylome

Il siège sur les muqueuses malpighiennes et est également lié au virus HPV. Le mode de transmission est essentiellement sexuel. Il se développe principalement au niveau de l'exocol utérin, du vagin, de la vulve, de la zone ano-rectale et du pénis, plus rarement au niveau pharyngo-laryngé.

Macroscopiquement, les condylomes peuvent être acuminés (exophytiques, en pointe ou en saillie par rapport à la surface) ou plans.

Microscopiquement : prolifération épithéliale malpighienne avec des aspects cytopathogènes. Les cellules infectées par l'HPV sont dénommées koïlocytes (figure 07.02).

Ces tumeurs sont bénignes donc ne récidivent pas après exérèse complète. Certains condylomes constituent des états précancéreux et peuvent évoluer vers un carcinome malpighien (avec souvent une phase de carcinome in situ préalable) : c'est en particulier le cas des condylomes plans génitaux, qui sont à l'origine de la grande majorité des cancers du col utérin.

Carcinomes malpighiens

Carcinomes malpighiens cutanés

Il s'agit de tumeurs très fréquentes. Elles sont de diagnostic précoce car accessibles au dépistage (lésions visibles, prélèvements faciles). On distingue deux types différents sur le plan clinique et histologique :

•   les carcinomes épidermoïdes ;

•   les carcinomes basocellulaires de localisation uniquement cutanée.

Facteurs de risques : favorisés par une exposition prolongée au soleil, ces carcinomes touchent surtout les adultes à peau claire, principalement dans les régions du corps exposées au soleil. Le carcinome basocellulaire touche des personnes souvent plus âgées que le carcinome épidermoïde, avec une localisation préférentielle sur le visage.

Une prédisposition génétique, le xeroderma pigmentosum favorise l'apparition précoce de multiples tumeurs cutanées.

Prévention : protection UV des zones exposées au soleil.

À noter : ces deux carcinomes présentent les mêmes facteurs de risques que les mélanomes alors qu'il s'agit d'un type histologique de tumeur tout à fait différent.

Carcinomes épidermoïdes cutanés

Macroscopie : la tumeur est le plus souvent ulcéro-végétante, plus ou moins infiltrante (figure 07.03).

Microscopie : la différenciation malpighienne est variable, permettant de distinguer les formes bien ou peu différenciées selon que la tumeur ressemble à l'épithélium d'origine avec persistance de desmosomes et présence de kératinisation (bien différenciée) ou au contraire présente des atypies cytonucléaires très marquées avec désorganisation architecturale (peu différenciée) (figure 07.04).

Évolution : l'extension tumorale est surtout locale. Les métastases ganglionnaires sont tardives et les métastases viscérales sont exceptionnelles.

Carcinomes basocellulaires

Macroscopie : la tumeur est souvent ulcérée, entourée de petites surélévations (figure 07.05). Plus rarement, elle est de forme plane parfois déprimée.

Microscopie : les cellules ressemblent aux cellules basales de l'épiderme et sont réparties en lobules. Classiquement, il n'y a pas de différenciation épidermoïde, ni de maturation cornée (figure 07.06).

Évolution : elle est purement locale et lente. Le carcinome basocellulaire ne donne jamais (ou pratiquement jamais) de métastases, ce qui est une exception parmi les tumeurs malignes. En revanche, il peut avoir une extension locale très importante jusqu'aux structures osseuses sous-jacentes et donner des ulcérations étendues ou quelquefois des hémorragies. Il n'y a pas de récidive si l'exérèse est complète.

Carcinomes épidermoïdes des muqueuses

L'aspect histopathologique est identique à celui des carcinomes épidermoïdes cutanés, avec des degrés de différenciation et de maturation variables.

•   Voies aéro-digestives supérieures (pharynx, larynx, cavité buccale)

Facteurs de risque : tabac, alcool et surtout association des deux, HPV, mauvais état bucco-dentaire, existence de lésions précancéreuses (exemple : dysplasie).

Macroscopie : tumeurs végétantes et infiltrantes, parfois plurifocales.

Évolution : métastases ganglionnaires puis viscérales. Association possible à un carcinome malpighien bronchique (à rechercher systématiquement puisqu'ils partagent le même facteur de risque : le tabac +++).

•   Bronches

Il s'agit d'un carcinome d'origine métaplasique : le carcinome malpighien survient sur un épithélium de type glandulaire ayant subi une métaplasie malpighienne sous l'effet d'une agression extérieure : le tabac.

Facteur de risque majeur : tabac.

Prévention : lutte contre le tabagisme.

Macroscopie : aspect surtout végétant dans les grosses bronches, avec envahissement et destruction du parenchyme pulmonaire et nécrose de certains territoires tumoraux. Parfois la nécrose est telle qu'il peut y avoir un aspect cavitaire (diagnostic différentiel avec la tuberculose, une aspergillose ou avec un abcès).

Évolution : le carcinome malpighien bronchique est souvent découvert à un stade avancé, d'emblée inopérable. Les métastases siègent dans les ganglions lymphatiques, le cerveau, la glande surrénale, le reste du parenchyme pulmonaire, le foie, les os. Le pronostic est en général mauvais.

•   Col utérin

Facteurs de risque : infection à HPV, tabac, nombreux partenaires sexuels.

Prévention : vaccination contre les principaux sous-types oncogènes d'HPV, dépistage organisé avec test HPV et frottis si présence d'HPV puis ablation des lésions pré-néoplasiques.

Macroscopie : à un stade avancé, la tumeur est souvent ulcéro-infiltrante et végétante, avec parfois un aspect hypertrophique du col utérin.

Microscopie : le dépistage organisé permet d'identifier des lésions à un stade débutant qui peuvent régresser ou au contraire évoluer vers un carcinome épidermoïde infiltrant (Figure 07.07).

Évolution : métastases ganglionnaires, métastases à distance. Le pronostic dépend principalement de la précocité du diagnostic, d'où l'intérêt du dépistage par un prélèvement des cellules du col utérin en position gynécologique pour réalisation d'un test HPV associé selon le résultat à la lecture du frottis cervico-vaginal. Une biopsie de contrôle pourra alors être effectuée.

•   Œsophage

Facteur de risque : alcool.

Prévention : lutte contre l'alcoolisme.

Macroscopie : tumeur souvent ulcéro-infiltrante et nécrotique, sténosante (signe clinique dysphagie ++), rarement bourgeonnante.

Évolution : métastases ganglionnaires, extension locale. Ce carcinome, souvent découvert à un stade avancé, est de mauvais pronostic.

Tumeurs glandulaires

Tumeurs glandulaires exocrines

Ce sont des tumeurs fréquentes, bénignes (adénomes) ou malignes (adénocarcinomes). Elles intéressent les organes creux ou les parenchymes glandulaires. Elles se développent parfois sur une métaplasie glandulaire développée à partir d'un tissu malpighien ou urothélial. Leurs aspects macroscopiques et histologiques varient selon le type d'organe. Elles reproduisent morphologiquement des structures glandulaires, avec un degré de différenciation plus ou moins important.

Les adénomes sont des tumeurs bien différenciées. Les adénocarcinomes ont par contre des degrés de différenciation variables :

•   bien ou moyennement différenciés : architecture glandulaire persistante ;

•   peu différenciés : caractères glandulaires difficiles à mettre en évidence à l'examen histologique standard, d'où la nécessité d'utiliser des colorations spéciales (présence de mucus) et des techniques immunohistochimiques (expression de l'antigène prostatique spécifique (PSA) dans les adénocarcinomes prostatiques, de TTF-1 (Thyroid Transcription Factor-1) dans les adénocarcinomes pulmonaires…).

Tumeurs des organes creux

Ce sont les tumeurs des muqueuses digestives (estomac, côlon et rectum, (figure 07.08), beaucoup plus rarement grêle), des muqueuses utérines (endomètre, plus rarement endocol), des voies biliaires et pancréatiques, des bronches…

Aspects macroscopiques communs

Les adénomes font saillie dans la lumière de l'organe creux et prennent l'aspect d'un polype, qui est soit attaché à la muqueuse par un axe conjonctif (polype pédiculé, flèche noire, (figure 07.09), soit implanté directement sur la muqueuse (polype sessile). Leur taille est variable de quelques millimètres à plusieurs centimètres.

Les adénocarcinomes prennent trois aspects principaux souvent associés : bourgeonnant, ulcéré et infiltrant :

•   la forme débutante est souvent purement bourgeonnante ;

•   les tumeurs plus volumineuses associent une ulcération centrale, une zone bourgeonnante périphérique, une infiltration pariétale sous-jacente (flèche rouge, (figure 07.09) ;

•   certaines tumeurs sont purement infiltrantes, comme la linite gastrique.

D'autres adénocarcinomes ont une consistance gélatineuse due à une abondante sécrétion de mucus. On les appelle carcinome colloïde muqueux ou carcinome mucineux.

Tumeurs colorectales

Facteurs de risque : alimentation riche en graisses animales et pauvre en fibres (carcinogénèse par contact prolongé des matières fécales renfermant des substances toxiques (amines aromatiques par exemple) avec la muqueuse colique → prédominance dans la partie distale du colon), maladie inflammatoire chronique du tube digestif, prédisposition génétique (syndrome de Lynch, polypose adénomateuse rectocolique familiale…).

Le dépistage est proposé à partir de 50 ans par recherche de sang dans les selles.

Adénomes colorectaux

La prolifération cellulaire adénomateuse reste strictement intramuqueuse. Les cellules épithéliales qui forment ces adénomes présentent des anomalies morphologiques qui traduisent des anomalies de leur génome (voir chapitre 6). Il existe deux niveaux de dysplasie : bas grade et haut grade selon l'importance des anomalies architecturales et cytologiques (notamment la perte de la polarisation cellulaire, les atypies cytonucléaires et la présence de mitoses anormales (figures 07.10 et 07.11).

Il existe trois variétés histologiques d'adénomes colorectaux, définies selon l'architecture générale de la tumeur :

•   les adénomes tubuleux s'observent le plus souvent sur le rectosigmoïde avec une fréquence maximale entre 50 et 60 ans ; ils réalisent un polype (formation en saillie sur la muqueuse, arrondie ou polylobée), pédiculé ou sessile (figure 07.12) et sont constitués de glandes coliques (adénome tubuleux en dysplasie de bas grade, (figure 07.10) et de haut grade, (figure 07.11) ;

•   les adénomes villeux, plus rares, forment des masses sessiles ou polypoïdes, molles, recouvertes de mucus, et constituées de fines digitations. Les récidives après exérèse sont fréquentes car leur base d'implantation est large et ils sont difficiles à retirer sans chirurgie

•   Les adénomes tubulo-villeux associent les deux aspects précédents.

Dans tous les adénomes colorectaux, il existe des modifications cellulaires et architecturales (lésions dysplasiques) qui permettent de les classer comme des lésions précancéreuses.

Adénocarcinomes colorectaux

L'adénocarcinome colo-rectal est un cancer très fréquent qui représente la seconde cause de décès par cancer, observé à un âge moyen de 60 à 65 ans. Il siège le plus souvent sur le rectosigmoïde (66 %), plus rarement sur le côlon gauche, le caecum ou le côlon transverse. Il se traduit cliniquement par des troubles du transit et des hémorragies.

Macroscopie : la tumeur est le plus souvent ulcérée à sa partie centrale, avec un bourgeonnement plus ou moins marqué en périphérie et une infiltration pariétale qui s'étend vers la séreuse (figure 07.09). Elle peut être circonférentielle et sténosante.

Microscopie : en règle générale, l'adénocarcinome colorectal réalise une prolifération tumorale bien ou moyennement différenciée constituée de structures glandulaires rappelant les glandes coliques (il est parfois dénommé adénocarcinome lieberkühnien (figure 07.13). Dans certains cas, il existe une mucosecrétion très abondante, dissociant les formations carcinomateuses et le stroma : la tumeur prend alors le nom de carcinome colloïde muqueux (ou carcinome mucineux). Plus rarement, la tumeur est formée de cellules tumorales mucosecrétantes indépendantes les unes des autres : cellules en « bague à chaton ». Ce dernier aspect microscopique est souvent associé à un aspect macroscopique de linite (au niveau de l'estomac, notamment).

Évolution : l'extension tumorale est centrifuge, traversant progressivement les différentes tuniques pariétales du côlon vers la séreuse, avec souvent une invasion lymphatique. Les métastases les plus fréquentes sont ganglionnaires et hépatiques.

Progression adénome - cancer

Dans le côlon, il existe une véritable filiation entre adénome et adénocarcinome. Dix à 15 % des adénomes sont susceptibles de cancérisation et l'on considère que la grande majorité des adénocarcinomes coliques dérivent de polypes adénomateux. Plus le polype est gros, plus il y a de risque qu'il soit cancérisé, mais c'est seulement l'étude microscopique qui déterminera si un polype est un adénome ou si l'adénome s'est transformé en cancer.

La polypose adénomateuse rectocolique familiale par mutation des gènes APC ou MUTYH est une adénomatose caractérisée par le développement progressif de très nombreux adénomes avec une évolution inéluctable vers l'apparition d'un ou plusieurs adénocarcinomes coliques.

Tumeurs des organes pleins

Ce sont des tumeurs des parenchymes glandulaires pleins : seins, glandes annexes du tube digestif (foie, pancréas, glandes salivaires), prostate, reins…

Aspects macroscopiques communs

Les adénomes des parenchymes glandulaires se présentent habituellement sous la forme d'un nodule : masse unique, régulièrement arrondie ou ovoïde, encapsulée. Ce nodule est généralement homogène, de même consistance et de même coloration que le tissu normal voisin qu'il repousse et déforme.

Les adénocarcinomes des parenchymes glandulaires sont de forme irrégulière, mal limités, envoyant des prolongements dans le tissu sain et de consistance souvent dure. Ils peuvent être nodulaires, uniques ou multiples, fréquemment remaniés par des phénomènes nécrotiques et hémorragiques leur conférant un aspect hétérogène à la coupe. La consistance est généralement ferme, sauf en cas de nécrose. Ils peuvent aussi être kystiques (cystadénocarcinome), mais comportent souvent des zones végétantes en plus des secteurs kystiques. La stadification T du TNM s'appuie largement sur leur taille (le plus grand diamètre).

Tumeurs mammaires

Tumeurs bénignes : adénofibromes

Au niveau de la glande mammaire, la prolifération adénomateuse est associée au développement du tissu conjonctif réalisant une tumeur à double composante, glandulaire et conjonctive. On retrouve également cela dans la glande prostatique.

Présentation clinique : l'adénofibrome survient chez la femme jeune. Il s'agit d'une tumeur arrondie, ferme et mobile.

Macroscopiquement, il forme un nodule rond, dur et encapsulé.

Microscopiquement, il s'agit d'une prolifération à la fois épithéliale et conjonctive sans critères cytologique ou architectural de malignité.

Pronostic : l'adénofibrome ne récidive pas si l'exérèse a été complète. Il n'est pas systématiquement opéré.

Tumeurs malignes : adénocarcinomes

Une femme sur 10 sera atteinte d'un cancer du sein pendant sa vie.

Facteurs de risque :

•   sexe féminin, avec une augmentation du risque avec l'âge ; très rare chez les hommes ;

•   importante exposition aux estrogènes (intervalle long puberté-ménopause) ;

•   âge élevé à la première grossesse ;

•   obésité, régime riche en graisses ;

•   histoire familiale de cancer de sein ;

•   altération des gènes de prédisposition au cancer du sein : BRCA1 et BRCA2.

N.B. : il n'y pas de filiation entre adénofibrome et cancer du sein. Les lésions précancéreuses du sein sont des lésions épithéliales de type dysplasique, parfois responsables de calcifications.

Le dépistage est recommandé par palpation tous les ans dès l'âge de 25 ans. À partir de 50 ans, une mammographie tous les deux ans, complétée si nécessaire par une échographie, est recommandée.

Présentation clinique : les adénocarcinomes du sein surviennent plus fréquemment chez la femme après 50 ans, mais parfois avant 35 ans. La localisation la plus fréquente est le quadrant supéro-externe du sein (le plus riche en glandes mammaires) puis la région rétro-mamelonnaire. La tumeur est soit de découverte clinique devant une masse palpable de la glande mammaire, dure, parfois fixée ; soit de découverte mammographique par dépistage, devant un foyer de microcalcifications.

Macroscopie : il s'agit le plus souvent d'un nodule tumoral stellaire, éventuellement adhérent, avec rétraction du mamelon quand il est proche.

Microscopie : la prolifération adénocarcinomateuse est plus ou moins bien différenciée. Il faudra rechercher la présence d'emboles vasculaires sanguins ou lymphatiques. La prolifération carcinomateuse peut rester limitée aux canaux et lobules : on parle de carcinome in situ.

Pronostic : le pathologiste intervient en évaluant le grade histopronostique de Scarff, Bloom et Richardson (SBR) modifié par Elston et Ellis, qui prend en compte la différenciation glandulaire, les anomalies cytonucléaires et l'activité mitotique (figure 07.14). Il évalue également le stade pTNM. Il évalue l'expression de récepteurs hormonaux et de HER2 afin de guider le traitement.

Évolution : l'extension tumorale est :

•   locale par invasion des structures voisines (peau, mamelon, muscle pectoral) ;

•   régionale par dissémination ganglionnaire axillaire ;

•   à distance par diffusion hématogène au poumon, à la plèvre, à l'os et au cerveau. Le tropisme osseux est net et justifie la réalisation de scintigraphie osseuse pour détecter ces métastases.

Tumeurs des glandes et tissus endocrines

Il s'agit des tumeurs développées dans les glandes endocrines formant des organes : hypophyse, thyroïde, parathyroïdes, surrénales...

Une particularité des tumeurs des glandes endocrines est leur capacité à produire des hormones. Ainsi, certains adénomes, dits hyperfonctionnels, peuvent être révélés par des troubles endocriniens : hypercalcémie par hypersécrétion de parathormone dans un adénome parathyroïdien, hyperthyroïdie due à un adénome thyroïdien hyperfonctionnel (nodule « chaud » à la scintigraphie). D'autres adénomes sont non fonctionnels : c'est d'ailleurs le cas le plus fréquent pour les adénomes thyroïdiens, qui ne secrètent le plus souvent pas ou peu d'hormones thyroïdiennes, ne captant pas l'iode (nodule « froid » à la scintigraphie).

Comme dans les autres parenchymes glandulaires, on distingue les adénomes et les adénocarcinomes.

Tumeurs bénignes (adénomes)

Les tumeurs bénignes sont de loin les plus fréquentes. Dans la thyroïde, qui est la glande endocrine la plus souvent atteinte, l'adénome se présente comme un nodule plein (ou parfois kystique), bien limité et encapsulé, refoulant le tissu thyroïdien normal en périphérie. Microscopiquement, la tumeur par définition très bien différenciée est formée de vésicules, contenant de la colloïde, bordées par des cellules cubiques de type thyréocytes (figure 07.15).

Adénocarcinomes

Concernant les adénocarcinomes des glandes endocrines, la glande la plus souvent atteinte est la thyroïde (adénocarcinomes papillaire, (figure 07.16) ou vésiculaire, de pronostics excellents), tandis que les tumeurs malignes de la corticosurrénale (corticosurrénalome malin), de la parathyroïde ou de l'hypophyse restent exceptionnelles.

Tumeurs neuroendocrines

Elles sont développées à partir de cellules neuroendocrines appartenant au système endocrinien diffus. Ces cellules sont présentes essentiellement dans le tube digestif et les bronches, dans le pancréas et beaucoup plus rarement dans d'autres localisations (thymus, thyroïde, peau…). Elles sécrètent des hormones peptidiques par l'intermédiaire de grains sécrétoires cytoplasmiques et expriment des protéines communes avec le système nerveux. Elles sont pour cela désignées sous le terme de cellules neuroendocrines. En immunohistochimie, les grains neurosécrétoires peuvent être mis en évidence par des anticorps anti-chromogranine et les vésicules cytoplasmiques de type pré-synaptique par des anticorps anti-synaptophysine.

Actuellement, on considère qu'il n'existe pas de tumeurs neuroendocrines véritablement bénignes. Toutes les tumeurs neuroendocrines ont un certain potentiel de malignité, mais celui-ci varie de façon très importante selon le degré de différenciation de la tumeur. La distinction entre les tumeurs neuroendocrines bien différenciées et peu différenciées revêt donc une grande importance pour l'évaluation du pronostic.

Tumeurs neuroendocrines bien différenciées

Ce sont les plus fréquentes, notamment dans le tube digestif et le pancréas. Elles sont parfois appelées « tumeurs carcinoïdes », mais cette appellation n'est pas admise dans tous les organes, et n'est actuellement utilisée que dans l'arbre broncho-pulmonaire et éventuellement pour l'appendice.

Macroscopie : masse arrondie, bien limitée, de coloration souvent jaune ou beige,

Microscopie : la tumeur est constituée d'îlots ou de travées cellulaires séparés les uns des autres par un riche réseau capillaire (figure 07.17). Les cellules sont régulières et l'activité mitotique souvent très faible. Elles expriment la chromogranine (figure 07.18) et la synaptophysine en immunohistochimie.

Pronostic : les tumeurs neuroendocrines bien différenciées ont une évolution lente. Plus la tumeur est volumineuse et l'activité mitotique importante, plus le risque d'extension métastatique ganglionnaire et viscérale augmente. Même lorsqu'il existe des métastases, une survie prolongée est souvent observée.

Tumeurs neuroendocrines peu différenciées

Leur agressivité est beaucoup plus importante que celle des tumeurs neuroendocrines bien différenciées. Ces tumeurs manifestement malignes sont souvent appelées « carcinomes neuroendocrines (peu différenciés) ». L'exemple le plus répandu est le carcinome à petites cellules. Il s'agit d'une tumeur neuroendocrine de haut degré de malignité dont la localisation la plus fréquente est broncho-pulmonaire. Elle représente environ 20 % des cancers du poumon et survient presque exclusivement chez le fumeur. Histologiquement, la tumeur est faite de nappes de petites cellules avec une très forte activité mitotique sans signe de différenciation. Ce carcinome est d'évolution très rapide et s'accompagne précocement de métastases rendant la chirurgie inutile. Il est initialement chimio-sensible, mais le pronostic à moyen terme est très sombre. Il s'accompagne souvent de sécrétion hormonale pouvant entrainer un syndrome paranéoplasique (sécrétion d'hormone antiduriétique, d'ACTH etc.).

Il existe des syndromes génétiques dits de néoplasies endocriniennes multiples associant des tumeurs endocrines ou neuroendocrines (carcinome médullaire de la thyroïde) avec des tumeurs parathyroïdiennes, surrénaliennes voire des syndromes malformatifs.

Tumeurs urothéliales

Ce sont les tumeurs qui se développent à partir de l'urothélium revêtant les voies excréto-urinaires : bassinet, uretères et surtout vessie.

Fréquence : 6 nouveaux cas par an de tumeurs urothéliales de vessie en France pour 100 000 habitants, survenant de préférence chez l'homme après 40 ans.

Facteurs de risque : le tabac, exposition professionnelle à certains carcinogènes (dans ce cas un dépistage par cytologie urinaire peut être réalisé).

Présentation clinique : l'hématurie et les troubles mictionnels sont les signes révélateurs les plus fréquents.

Caractéristiques anatomopathologiques et évolutives : les tumeurs urothéliales peuvent être papillaires (75 %) ou planes (figure 07.19 et 07.20), avec des voies moléculaires engagées distinctes. Les tumeurs papillaires récidivent fréquemment, la surveillance est donc essentielle. Le potentiel d'agressivité de ces tumeurs est corrélé à leur degré de différenciation (bas grade ou haut grade) et leur niveau d'infiltration dans la paroi (stade). Tant qu'une tumeur n'infiltre pas le muscle vésical on se contente de la réséquer par voie endoscopique. Lorsqu'elle infiltre le muscle, un traitement radical par cystectomie le plus souvent ou parfois radio-chimiotherapie.

 

L'essentiel à retenir

Tumeurs malpighiennes

Les tumeurs malpighiennes se développent le plus souvent à partir des épithéliums malpighiens cutanéo-muqueux ou plus rarement sur métaplasie à partir de muqueuses glandulaires ou urothéliales. Les facteurs de risque sont particulièrement importants dans certaines localisations : tabagisme pour les voies aéro-digestives supérieures et bronches, infection à papillomavirus pour le col utérin et exposition solaire pour la peau.

Au niveau cutané, les carcinomes épidermoïdes sont facilement accessibles au dépistage et donc diagnostiqués précocement. Ils peuvent toutefois donner des métastases dans leur évolution, essentiellement dans les ganglions lymphatiques. Le carcinome basocellulaire est une entité particulière (seulement cutané) dont l'agressivité est uniquement locale.

Dans les localisations extra-cutanées, les carcinomes épidermoïdes sont souvent évolués au moment du diagnostic, avec un risque élevé d'atteinte ganglionnaire et de métastases viscérales.

Tumeurs glandulaires

Les tumeurs épithéliales à différenciation glandulaire peuvent être développées dans les tissus exocrines ou endocrines. Elles sont bénignes (adénomes) ou malignes (adénocarcinomes).

Dans les organes creux, les adénocarcinomes se présentent souvent sous une forme ulcérée et bourgeonnante avec infiltration de la paroi. Dans les organes pleins, ils forment des masses tumorales nodulaires à contour souvent irrégulier et d'aspect hétérogène. Les tumeurs glandulaires endocrines se développent surtout dans la thyroïde, plus rarement dans les autres glandes endocrines.

Les tumeurs neuroendocrines correspondent aux tumeurs des cellules du système endocrinien diffus. Les tumeurs bien différenciées ont une croissance lente, une évolution surtout loco-régionale et un risque métastatique faible ou modéré. A contrario, les tumeurs peu différenciées (carcinomes neuroendocrines) sont très agressives et de pronostic sombre, avec des métastases viscérales précoces. Le carcinome neuroendocrine le plus courant est le carcinome à petites cellules du poumon.

Tumeurs urothéliales

Les tumeurs urothéliales sont développées au niveau de l'arbre urinaire. Elles sont souvent papillaires et exphytiques, à développement longtemps superficiel, autorisant un traitement local par résection, mais comportent un risque important de récidive. Lorsqu'elles sont plus agressives avec infiltration du muscle détrusor, elles doivent alors faire l'objet d'un traitement chirurgical plus radical.